07 septembre, 2006

Blessures


Je crois qu’avec des faux pas et des faux plis chacun porte sa vie. Moi, à 13 ans, j’étais tout fière quand on me disait que j’étais une femme. Je ne savais pas ce que cela voulait dire être une petite femme en miniature, une poupée qu’on installait tranquillement dans la nuit, sur le plancher pour la violer. Pendant trois ans, la peur, la résignation, la culpabilité m’a empêché de parler. Puis à 16 ans avec du courage et une détermination, j’ai choisi de m’en sortir. Aujourd’hui je sais que j’y suis arrivé, presque, car on n’y est jamais. On peut toujours faire mieux dans ce bas monde.

13 ans c’est la première fois, que l’ami de ma MÈRE m’a touché. Je savais qu’il n’avait pas le droit. J’ai parlé, mais pour ma mère je me servais de cet incident pour lui gâcher la vie. Ce qui comptait pour elle c’était de vivre la vie de jeunesse qu’elle n’avait pas eu, selon elle. C’est exactement les mots qu’elle a dit. Moi je ne supporte pas la colère des autres et surtout celle de ma mère. Pour qu’elle continue de m’aimer j’ai accepté qu’il revienne et promis de ne plus rien dire. Sûrement mon côté masochiste qui ressortait déjà, j’étais douce et aimante et hyper-sensible avec tout ceux que j’aimais et je préférais souffrir pour avoir l’amour de MA MÈRE. Pourtant ma mère ressemblait à une larve entre le sommeil et l’attente de prendre forme, à un tas informe de laideur et de mollesse qui abdique ses responsabilités. Elle préférait se cacher sous les couvertures à cœur de journée. Ce qu’elle aimait le plus c’était ses sorties dans les bars, ses soirées où elle me traînait, me montrait à ses amis, elle leur demandait même de s’occuper de moi, malgré que je refusais, ils me dévisageaient comme un bout de viande. Pour elle, j’aurais été bien, je crois qu’elle n’était pas consciente, elle ne l’a jamais été. Elle vénérait sa vodka, ses amants, ceux qui l’a FOURRAIENT si fort que j’avais PEUR, du moins les premières fois. « Qu’est-ce qu’ils lui font pour qu’elle crie comme ça ? » Chaque semaine il y avait un nouvel homme, parfois il y en avait plus qu’un en même temps. Moi je devais penser à me cacher, me protéger d’eux.

Je pense que chaque enfant voit sa mère comme une sainte, moi je ne comprenais plus. Je pense aussi que c’est effrayant d’écrire tout ces choses sur sa propre mère. Je ne lui démontre pas la haine que j’éprouve pour elle c’est pas dans ma nature. Il n’y a pas longtemps je n’aurais pas pu écrire tout cela puisque j’étais la seule coupable de tout et elle encore une sainte. C’est elle, plus que tous les autres qui m’ont BAISÉ, SODOMISÉ, BATTU, PAYÉ, qui m’a CORROMPU, j’ai encore le sentiment d’être souillée, jusqu’au plus profond de mon corps. Cette saleté ne part pas c’est incrusté dans mes os. Ce n’était pas assez pour elle que je sois spectatrice de toutes ses frivolités, elle m’avait choisi comme confidente à tout ses histoires de CUL.

Je me souviens de ces premières soirées où il est revenu à la maison suite à mon dévoilement.

«Je peux pas me rendormir, à cause de cette histoire, il faut que je dorme que j’oublie ça. Mais je peux pas. Ces choses spéciales, c’est sales. Il croit que j’en ai envie comment je vais faire pour le persuader qu’il se trompe ? Je suis tendue, énervée. J’ai dû dormir sans m’en rendre compte, et j’ai passé la journée pareil, comme une somnambule. Mais maintenant c’est à nouveau la nuit. Et j’ai PEUR . Je sens qu’il va revenir, il est tard la nuit. Je voulais pas qu’il revienne, je voulais qu’il me laisse tranquille. Cette nuit-là, il m’a réveillée, il s’est assis sur mon lit, j’avais vraiment peur de cette expression qu’il avait. Il avait les yeux méchants et il a tiré sur le drap. Je lui ai demandé ce qu’il faisait dans ma chambre. Il me caresse les cheveux, la figure, il me serre dans ses bras. «Mon Dieu Maman», j’ai peur. Il me fait des bisous dans le cou, il pose ses mains sur mon bras puis sur mon ventre. Je savais que je devais pas laisser faire. Je me tortillais, me collais contre le mur mais il continuait. Il voulait que j’obéisse, que je le respecte. Mais moi je lui répétais de me lâcher, je ne voulais pas. Mais il entendait pas ou il voulait pas entendre.. Il m’a dit de rester tranquille, m’allonger et le laisser faire. Il m’a regardé longtemps, il avait les gestes lents pour me replier les jambes vers le haut, il regardait. Je sais pas ce qu’il regarde mais j’ai honte de tout, de moi, de lui, de ma position qu’il m’obligeait à prendre. Je pleure mais ça ne fonctionne pas, pas de pitié. Puis quelque chose est entré en moi.
« Qu’est-ce c’est ? » « Tais-toi». Je sentais ce quelque chose me gratter, bouger dans mon ventre, et ça fait mal. J’ai beau le supplier, il ne répond plus. J’essaie de dégager mes jambes, de mettre mes coudes sur le lit pour voir se qui se passe, pourquoi j’ai mal. Pas le temps, il m’envoie une grosse gifle et je retombe en arrière. Après qu’il m’ait fait mal et rabaissée plus bas que tout, il s’est enlevé de sur moi. Mais je ne peux plus me relever, mon ventre est soulagé, mais la nausée ne me lâche pas. Ce soir-là j’ai appris la HONTE. La honte c’est une émotion mixte. Elle est la version sociale de la culpabilité. Nous n’éprouvons jamais de honte lorsque nous sommes seul, face à nous-même. La honte est un sentiment qui est toujours vécu « devant les autres» à cause de leur jugement réel ou virtuel. La honte survient lorsque nous sommes vu dans un aspect de nous que nous jugeons très négativement

À la même époque, j’ai rencontré A. Mon premier amour, il était parfois fier de moi, j’étais en apparence, toujours souriante, aimable, prêt à tout pour lui, à me vendre, à souffrir, à accomplir ses moindres désirs pour qu’il soit fier de moi.. Il m’a tout montré du sexe mais j’avais déjà bien compris et moi je voulais l’aider. L’aider parce qu’il était le seul, le plus fort, celui qui me défendait quoiqu’il arrive, celui qui me cajolait quand je ne voyais plus de lendemain, le seul à qui, enfin, j’appartenais, mon protecteur, Il me traitait certains jours comme une princesse mais il me parlait aussi parfois comme à son chien. A. était, en fait, mon souteneur. Parfois, il me battait mais je restais là avec lui car c'était le seul endroit où j’étais HEUREUSE , j’étais faites pour l’aimer je ne lui demandait jamais rien, je lui obéissais quoiqu'il demandait, j’aurais fait n’importe quoi pour son bonheur. J’ai décidé que je l’aiderais dans cette tâche, je serais aussi ambitieuse que lui, je serais sa préférée, sa plus forte, celle qui lui donnerait le plus. Il disait qu’il fallait débuter jeune dans ce métier, j’ai débuté drôlement vite, je travaillais plusieurs heures par jour et j’étais VACHEMENT performante. Je n’étais plus une petite fille de 13 ans, j’étais sa SALOPE, sa PUTE. J’aimais ça parce que j’étais à part, j’avais l’impression d’être importante à ses yeux, comme une princesse. Je me vengeais, en faisant ces trucs DÉGOUTANTS, de tout ceux qui préféraient fermer les yeux, mais surtout de mes GÉNITEURS.

Pendant trois ans je me suis fait abuser, violer, battre, j’ai fait la prostitution, j’étais une PUTE, une vraie.Je cherchais par quel moyen, lorsqu’on est privé du recours à l’amnésie, me guérir d’une maladie dont je ne connais pas encore le nom.

Aujourd’hui , je suis toujours aussi obsédée par le regard des autres par mon corps, par mon désir de rester jeune, d’être la plus belle, d’être la plus désirable des femmes.

Parallèlement, je sens encore flouée par les années perdues, parfois je me sens fatiguée, épuisé mais après un long silence entre le vide et moi, apr`s avoir vécu dans une vie sans but, j’ai décidé de vivre. En essayant d’effacer de ma mémoire, mes souvenirs du passé, je veux décider de croire, que tout peut aller.

Je crois toujours avoir été soumise,mais ça, je crois que ça prends beaucoup de courage pour arriver à le dire, mais avant tout pour se l’avouer à soi-même. Dans la société, c’est bien vu d’être une femme forte et indépendante, c’est du moins l’image que je me fais d’une femme qui réussit dans LA vie mais pas nécessairement dans SA vie, j’en suis consciente. Pour moi l’image passe avant tout même mon bonheur, c’est ma FOLIE.

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3 Comments:

Anonymous Anonyme said...

Mon Dieu, jeune fille, comme ce texte m'a ému. Comme j'ai reconnu certaines de vos blessures dans les miennes. Comme je vous comprends. Je n'avais jamais pris le temps de vous lire mais aujourd'hui, je découvre une femme très forte, superbe, courageuse et je vais m'empresser de vous mettre dans mes liens car il faut que d'autres sachent combien vous méritez d'être heureuse.

Amitiés,

Ame

9/21/2006 12:27 a.m.  
Anonymous Anonyme said...

Bonjour,
Je suis en France et il est 9h. Je viens de découvrir votre blog et il m'a ému.
J evoudrais vous convaincre qu'il y a des hommes pour qui l'idée de faire ce qu'on vous a fait est complètement inimaginable. Inimaginable avant qu'ils prennent la réalité d'un témoignage dans la gueule. Pour moi je n'éprouve du plaisir qu'vec une partenaire qui sait ce que je vais lui faire et qui est consentante. je vous embrasse.

9/22/2006 12:10 a.m.  
Anonymous Anonyme said...

En pleine figure, j'ai pris ce texte... Encore et toujours les mêmes saloperies se répètent...Sentiment de révolte ; je pense à vous tres fort.

Ma Belle Ame vous a rajouté dans les liens de notre blog.Je sais pourquoi vous avez aimé ses écrits ...Je crois que vous avez toutes les deux beaucoup beaucoup de choses à vous raconter......
Il est surprenant que par delà l'océan vous ayez trouvé notre blog, mais il parait que le hasard n'existe pas.

Croyez au bonheur, vous y aviez droit comme chacun.

Amitiés,

Christophe

9/22/2006 6:23 a.m.  

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